Le grand nombre de produits dangereux présents dans plusieurs établissements scolaires et autres milieux de travail combiné au nombre potentiel d’utilisateurs (élèves et personnel) fait en sorte que les risques de blessures chimiques doivent être pris en compte. Dans un tel contexte, une procédure d’intervention (premiers soins) rapide et efficace se doit d’être mise en place.
Intervenir le plus rapidement possible permet de réduire au maximum la lésion immédiate et le risque d’incapacité par la suite. Plus l’intervention sera rapide et efficace, plus elle aura des chances de limiter les séquelles graves et/ou permanentes.
Dans tous les cas d’urgence, la première étape avant d’intervenir est de s’assurer qu’il n’y a pas de danger pour soi-même. Si la personne qui veut apporter les secours n’a pas l’équipement de protection personnelle adéquat ou si elle a le moindre doute sur sa sécurité, elle ne doit pas intervenir et doit plutôt faire appel aux autres intervenants d’urgence (sécurité, pompier, ambulancier, etc.).
Cela est particulièrement vrai lorsqu’il s’agit d’une victime par inhalation d’un produit dangereux. L’intervenant doit avoir le réflexe de penser qu’il risque d’être en présence d’une vapeur (produit volatil) ou d’un gaz. Or, une des propriétés des gaz et vapeurs est de pouvoir se diffuser et se propager rapidement. L’intervenant risque donc d’être exposé au produit, et ce, même à distance de la source initiale de contamination.
L’exemple typique est le décès de personnes qui ont voulu secourir des victimes exposées au sulfure d’hydrogène. Le sulfure d’hydrogène est un gaz extrêmement toxique et lorsqu’il y a une victime, il arrive fréquemment que d’autres s’ajoutent au nombre en tentant de porter secours. Encore tout récemment (septembre dernier), deux agriculteurs de la région de la Montérégie sont décédés suite à une exposition au sulfure d’hydrogène. Le premier, en entrant dans une préfosse à purin, le deuxième, en tentant de le secourir. Certains se souviendront des trois décès survenus en 2004 dans un camping de la Rive-Sud de Montréal, encore une fois suite à une exposition au sulfure d’hydrogène. Une première victime a rapidement perdu connaissance en descendant dans une station de pompage reliée à une fosse septique, et tour à tour, quatre autres personnes ont subi le même sort en tentant de porter secours. Trois en sont décédées. Donc, secouristes, attention aux vapeurs et gaz comme le sulfure d’hydrogène (espaces clos, fosses à purin, fosses septiques, etc.).
Que le problème de santé soit dû à un contact direct avec le produit (peau, yeux, etc.) ou à une intoxication (inhalation, absorption cutanée, etc.), la procédure demeure généralement la même et se résume à quatre grandes étapes distinctes.
– Secourisme
– Rinçage
– CAPQ
– Hôpital
Secourisme:
Mesures reconnues de secourisme si nécessaire pour les cas d’arrêt cardiaque ou respiratoire ou autres urgences prioritaires (se référer au guide de la CSST, Secourisme en milieu de travail, éd. Les publications du Québec).
Rinçage:
Si la première étape n’est pas nécessaire, et sauf exception, rinçage immédiat et de bonne durée (eau tiède) en cas de projection sur la peau ou les yeux (rinçage de la bouche en cas d’ingestion).
IMPORTANT : Pour éviter les séquelles permanentes, il est extrêmement important de respecter la durée de rinçage recommandée. Le rinçage ne doit pas être interrompu. Si le transfert rapide de la victime à l’hôpital est nécessaire, il faut poursuivre le rinçage pendant le transport.
CAPQ:
Consulter le Centre antipoison du Québec (CAPQ) dans tous les cas (projection, inhalation, ingestion) pour:
Centre antipoison du Québec (CAPQ) : 1(800) 463-5060
Hôpital: Assurer rapidement le transport pour l’hôpital si nécessaire.
Toujours avoir en main le contenant du produit impliqué dans l’accident et/ou la fiche (signalétique ou de données de sécurité) du produit lorsque l’on contacte le CAPQ, l’hôpital, les pompiers, etc.
Verres de contact :
Toujours vérifier si la victime porte des verres de contact et si c’est le cas, lui demander de les enlever très rapidement. Passer immédiatement au rinçage si la victime a de la difficulté à les enlever. Les verres de contact seront probablement emportés par le jet d’eau. Si les verres de contact restent en place malgré le rinçage, les personnes qui portent secours peuvent aider la victime à les enlever. Si elles n’y parviennent pas, il faut poursuivre le rinçage pour la durée recommandée et vérifier auprès du CAPQ. Toujours informer les ambulanciers à leur arrivée du fait que la victime porte ou portait des verres de contact.
Sinon, enlever immédiatement tout vêtement ou bijou contaminé et rincer immédiatement à l’eau courante tiède la surface atteinte pour la durée recommandée.
S’il s’agit d’une substance poudreuse projetée directement sur la peau, rapidement mais délicatement, essuyer et enlever le plus gros (main gantée, pièce de tissu, brosse à poil mou) et puis débuter rapidement le rinçage pour la durée recommandée (se protéger pour le faire).
À moins d’avis contraire sur la fiche signalétique ou de données de sécurité ou du CAPQ, ne pas tenter de nettoyer les vêtements contaminés pour les porter par la suite. Les placer dans un sac plastique (ou chaudière) fermé, étanche et identifié « Vêtements contaminés par…. ». Les confier à votre collecte de déchets chimiques. Il est recommandé de couvrir d’eau les vêtements contaminés par des matières comburantes.
Sinon, s’assurer que les vêtements ont été bien décontaminés avant de les remettre (attention à protéger la peau et les yeux en les nettoyant). Il est particulièrement difficile de bien décontaminer les articles de cuir (ceintures, souliers, etc.).
Ne jamais faire boire ni vomir une personne qui est inconsciente ou en convulsion.
Attention aux gaz /vapeurs : NE PAS INTERVENIR sans protection adéquate, alerter la sécurité et/ou les intervenants d’urgence.
Du fait du grand nombre de produits dangereux présents dans plusieurs établissements scolaires et autres lieux de travail, l’employeur doit prévoir et définir une procédure d’intervention (premiers soins) rapide et efficace.
Les mesures de secourisme de base (respiration artificielle, réanimation cardiorespiratoire, etc.) font partie intégrante de cette procédure d’intervention.
Certains produits dangereux tels que le cyanure de sodium et le sulfure d’hydrogène, entre autres, nécessiteront des interventions plus spécialisées.
Pour intervenir efficacement et se protéger adéquatement, les secouristes doivent être bien formés aux dangers des produits auxquels ils risquent d’être exposés et aux procédures à suivre, sans quoi, il faut faire appel aux intervenants d’urgence externes (pompiers, ambulanciers, etc.).
Dans les lieux de travail où le nombre de produits dangereux est limité, il y a tout avantage à définir un protocole d’intervention efficace pour chaque produit. De même pour les produits qui sont utilisés régulièrement.
Dans tous les cas, que la blessure chimique se produise en milieu de travail ou à la maison, il est fortement recommandé de consulter rapidement le CAPQ.
Chimiquement vôtre,
Serge Pelletier
B.Sc.chimie M.Sc. environnement